Commissaire Ricciardi – Naples, an IX

Maurizio de Giovanni

Initialement débutées par la Tétralogie des quatre saisons, Maurizio de Giovanni a continué les aventures du commissaire Ricciardi par un Cycle des fêtes. Printemps et Pâques sont au programme du sixième volet, Les Pâques du commissaire Ricciardi, qui nous amène à faire un petit point sur cette excellente série.

La série débute l’hiver à Naples en 1931 : « An Neuf. De la nouvelle ère. L’ère des bottes, et des képis ornés de pompons […] De l’enthousiasme et de l’optimisme. De l’ordre et des villes propres par décret. Comme s’il suffisait d’un décret […] Le monde, malheureusement, tourne comme il tournait avant l’an I : mêmes crimes, mêmes passions, même sang. »

Ricciardi

Ainsi pense le commissaire Luigi Alfredo Ricciardi. Fils d’une bonne famille dont le père est mort lorsqu’il était très jeune et la mère pendant son adolescence, Ricciardi vit seul avec sa tante. Pas de femme, pas de sorties, une vie simple que personne ne comprend : l’homme est riche, dans la force de l’âge, c’est un excellent enquêteur…. Son repli est lié à une particularité qu’il tient particulièrement secrète : il voit, comme en un flash, les derniers instants des morts. Dans un livre simpliste, cela servirait à trouver la solution « par miracle ». Le talent de Maurizio De Giovanni est de nous donner à voir comment tout ceci façonne notre homme, et cela se mesure dans chaque livre. Ricciardi est un homme qui procède par écoute et par empathie, ce qui donne tout le ton à la saga, beaucoup plus centrée sur l’humain et ses rapports, que sur des traques impitoyables aux assassins.

Maurizio de Giovanni

D’autres personnages

L’intelligence de l’auteur tient aussi au fait que la série ne repose pas que sur le commissaire Ricciardi. Il y a une belle galerie de personnages créés autour de lui : le brigadier Maione, imposant et surprenant, deux femmes diamétralement opposées qui vont, ou non, tourner autour du commissaire et le médecin légiste, fort mal en point dans le dernier opus à cause de ses opinions politiques. Ces personnages évoluent sans cesse, l’auteur ne revenant pas régulièrement sur leurs traits acquis. À chaque roman, un pan de leur histoire se développe, ce qui renforce l’idée de lire toute la série dans l’ordre même si les intrigues diffèrent et ne se répondent pas.

Maurizio de Giovanni

Contexte historique

Un autre des points forts de la série est le contexte politique, les années 1930, où le Duce renforce son pouvoir avec l’accroissement du culte de la personnalité. Maurizio de Giovanni dépeint ceci avec subtilité : pas de grands cours d’histoire, juste quelques phrases éparpillées qui montrent ce qu’on peut faire (ou pas) et la pression que met le gouvernement sur les enquêtes. Et, au fur et à mesure des enquêtes, le poids grandit…

Naples

Naples sert de cadre à tous les romans de l’auteur (ceux-ci ou les contemporains dont on a pu voir un aperçu chez un autre éditeur) et Maurizio de Giovanni dépeint « sa ville » essentiellement par les gens qui l’habitent. Il nous livre différents portraits de quartiers, à travers la radiographie des couches sociales qui les peuplent, le tout sans grandes descriptions architecturales. Le rendu est parfait, les saisons rythment les intrigues, ce qui est particulièrement plus marqué avec les fêtes (Noël, Pâques) qui donnent une dimension particulière à la ville.

La série, à lire dans l’ordre, vous l’aurez compris, est publiée chez Rivages et traduite par Odile Rousseau.

Pour aller plus loin

Les autres romans policiers de l’auteur sont parus chez 10/18.
Lire notre article sur le compatriote Antonio Manzini et sa série du sous-préfet Schiavone.

Commissaire Ricciardi - Naples, an IX - Milieu Hostile

Commissaire Ricciardi – Naples, an IX

Maurizio de Giovanni

Initialement débutées par la Tétralogie des quatre saisons, Maurizio de Giovanni a continué les aventures du commissaire Ricciardi par un Cycle des fêtes. Printemps et Pâques sont au programme du sixième volet, Les Pâques du commissaire Ricciardi, qui nous amène à faire un petit point sur cette excellente série.

La série débute l’hiver à Naples en 1931 : « An Neuf. De la nouvelle ère. L’ère des bottes, et des képis ornés de pompons […] De l’enthousiasme et de l’optimisme. De l’ordre et des villes propres par décret. Comme s’il suffisait d’un décret […] Le monde, malheureusement, tourne comme il tournait avant l’an I : mêmes crimes, mêmes passions, même sang. »

Ricciardi

Ainsi pense le commissaire Luigi Alfredo Ricciardi. Fils d’une bonne famille dont le père est mort lorsqu’il était très jeune et la mère pendant son adolescence, Ricciardi vit seul avec sa tante. Pas de femme, pas de sorties, une vie simple que personne ne comprend : l’homme est riche, dans la force de l’âge, c’est un excellent enquêteur…. Son repli est lié à une particularité qu’il tient particulièrement secrète : il voit, comme en un flash, les derniers instants des morts. Dans un livre simpliste, cela servirait à trouver la solution « par miracle ». Le talent de Maurizio De Giovanni est de nous donner à voir comment tout ceci façonne notre homme, et cela se mesure dans chaque livre. Ricciardi est un homme qui procède par écoute et par empathie, ce qui donne tout le ton à la saga, beaucoup plus centrée sur l’humain et ses rapports, que sur des traques impitoyables aux assassins.

Maurizio de Giovanni

D’autres personnages

L’intelligence de l’auteur tient aussi au fait que la série ne repose pas que sur le commissaire Ricciardi. Il y a une belle galerie de personnages créés autour de lui : le brigadier Maione, imposant et surprenant, deux femmes diamétralement opposées qui vont, ou non, tourner autour du commissaire et le médecin légiste, fort mal en point dans le dernier opus à cause de ses opinions politiques. Ces personnages évoluent sans cesse, l’auteur ne revenant pas régulièrement sur leurs traits acquis. À chaque roman, un pan de leur histoire se développe, ce qui renforce l’idée de lire toute la série dans l’ordre même si les intrigues diffèrent et ne se répondent pas.

Maurizio de Giovanni

Contexte historique

Un autre des points forts de la série est le contexte politique, les années 1930, où le Duce renforce son pouvoir avec l’accroissement du culte de la personnalité. Maurizio de Giovanni dépeint ceci avec subtilité : pas de grands cours d’histoire, juste quelques phrases éparpillées qui montrent ce qu’on peut faire (ou pas) et la pression que met le gouvernement sur les enquêtes. Et, au fur et à mesure des enquêtes, le poids grandit…

Naples

Naples sert de cadre à tous les romans de l’auteur (ceux-ci ou les contemporains dont on a pu voir un aperçu chez un autre éditeur) et Maurizio de Giovanni dépeint « sa ville » essentiellement par les gens qui l’habitent. Il nous livre différents portraits de quartiers, à travers la radiographie des couches sociales qui les peuplent, le tout sans grandes descriptions architecturales. Le rendu est parfait, les saisons rythment les intrigues, ce qui est particulièrement plus marqué avec les fêtes (Noël, Pâques) qui donnent une dimension particulière à la ville.

La série, à lire dans l’ordre, vous l’aurez compris, est publiée chez Rivages et traduite par Odile Rousseau.

Pour aller plus loin

Les autres romans policiers de l’auteur sont parus chez 10/18.
Lire notre article sur le compatriote Antonio Manzini et sa série du sous-préfet Schiavone.