Eli Cranor, direction l’Arkansas

Eli Cranor - Chiens des Ozarks - Sonatine - Milieu Hostile

Avec Chiens des Ozarks, qui sort chez Sonatine en ce début d’année 2025, Eli Cranor nous offre un roman sombre et parfois furieux, qui colle au plus près de ses personnages et des lieux dans lesquels ils évoluent.

Si Chiens des Ozarks d’Eli Cranor s’ouvre sur une citation de Daniel Woodrell, ce n’est pas un hasard, tant les deux auteurs partagent les mêmes préoccupations telles que le territoire et les populations qui y vivent.

Daniel Woodrell a été traduit dès les années 1990 chez Rivages et, avec lui, nous avions découvert ce qu’était la face sombre des Ozarks. Faites-nous la bise, La Fille aux cheveux rouge tomate, La Mort du petit cœur et Un hiver de glace forment pour nous un quatuor d’exception.

Mais revenons à Eli Cranor. Le territoire, pour lui, est primordial, comme il s’en explique dans la plaquette de presse qui accompagne la sortie de Chiens des Ozarks : « Je suis né et j’ai grandi dans l’Arkansas. Pour le meilleur ou pour le pire, cet endroit m’a façonné et a fait de moi la personne que je suis. » L’endroit dans le livre, c’est Taggard, bled abandonné des monts Ozarks. Une fois son industrie principale envolée et ceux qui pouvaient rebondir après ces fermetures partis, il ne reste que ceux qui n’avaient pas d’autre choix que de rester, et qui tentent aujourd’hui de survivre dans un territoire largement défavorisé. Chiens des Ozarks suit ces différentes familles de Taggard qui vont se retrouver au cœur de cette histoire.

Eli Cranor - Chiens des Ozarks - Sonatine - Milieu Hostile

Comme nous le disait David Joy, qui a encensé ce livre : « Une des raisons pour lesquelles un écrivain souhaite parler de la classe dont il est originaire dans ses romans, c’est parce que c’est porteur de conflit et la tension permet aux romans de fonctionner. Et c’est vrai qu’à mon sens, les problèmes au quotidien que les personnes aisées rencontrent ne sont pas porteuses de cette tension, qui permet aux romans de fonctionner. Je n’écris pas des livres avec des gens qui se demandent où ils vont passer leurs prochaines vacances ou des gens qui ouvrent le New York Times pour vérifier l’indice du Dow Jones. Moi, j’écris pour parler de gens qui se sentent acculés, qui sont acculés, des gens qui se demandent d’où va venir leur prochain repas. »

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Chiens des Ozarks est particulièrement noir, les personnages tiraillés, les situations tendues et désespérées, c’est tout ce qu’on aime. Sans oublier un style puissant qui vous poussera à laisser tomber le livre que vous lirez après tant tout paraît fade à la suite de cette lecture – à moins que, si ce n’est pas déjà fait, vous ne vous lanciez dans Daniel Woodrell.

Bref, un excellent début d’année (noire).

Pour aller plus loin

Chiens des Ozarks d’Eli Cranor, traduit par Emmanuelle Heurtebize, est paru chez Sonatine

L’œuvre de Daniel Woodrell est publiée chez Rivages